Dans un précédent article, je vous racontais que j'allais tester à nouveau Japan Expo en tant qu'invité tenant un stand. Les quatre jours intenses sont passés. Plus quelques autres de pur repos égayés par les lasagnes de ma maman - le remède miracle à tout - et me voilà fin prêt à vous raconter mon expérience.
Mercredi 3 juillet, 17H20. Mon train a du retard. L'histoire commence bien. En m'asseyant sur un des bancs de la gare de Montpellier, je me surprends à penser au Shinkansen, le train à grande vitesse japonais. Son retard moyen par an est de 6 secondes. Même si ce chiffre record date de 2003, la ponctualité - entendez le respect - à la japonaise n'est plus à démontrer. Nous l'avons testé avec Sylvain, mon fils mais aussi mon binôme de la chaîne YouTube Mission japon. Et on confirme qu'en plus d'un confort très agréable, le TGV japonais arrive toujours à l'heure. Qui plus est, le contrôleur que nous verrons passer une dizaine de fois salue les passagers une fois à son entrée dans le wagon, une autre fois à sa sortie. Retour en France. Mon train démarrera avec 25 minutes en retard. Une compensation financière est prévue au-delà de 30 minutes. Si je me dotais d'un mauvais esprit que je n'ai pas - on ne rigole pas au fond de la classe - je pourrais affirmer que le respect des horaires et du voyageur commence quand il y a main au portefeuille.
Quand je sais que je dois passer plus de trois heures en promiscuité avec mes semblables dans un tombereau confiné, je m'angoisse d'y trouver de la marmaille braillante aux parents laxistes, du groupe d'amis aux anecdotes aussi navrantes que le volume à narration est haut, du rire chelou amusant jusqu'à Nîmes, irritant jusqu'à Paris. Rien de tout ça. Je soulage mes muscles - pas trop tout de même -, le stress me quitte, un léger sourire s'invite sur ma lippe détendue... jusqu'à ce que le téléphone du gars de la rangée de devant, de l'autre côté du couloir, répande une sonnerie que percevrait Beethoven en plein concert d'AC/DC au Stade de France. Il doit être occupé, il ne répond pas tout de suite. De là où je suis, je ne vois que ses jambes. Un bras tatoué attrape enfin le smartphone posé sur la tablette face à lui. Je vais voir à quoi il ressemble puisque comme toute personne emprunte d'un respect ému pour autrui, il va se déplacer en chuchotant jusqu'à la plateforme la plus proche, à l’abri des oreilles impudiques qui pourraient tout deviner d'une conversation privée, peut-être même intime. Le gars a répondu plusieurs fois sur tout le trajet. Je n'ai jamais vu sa tronche mais je sais tout de sa vie. Il n'a pas que la sonnerie d'un sourd, il en a aussi la voix, de celle dont on se demande si elle a vraiment besoin d'un téléphone pour se faire entendre par son interlocuteur à l'autre bout de la France. Je ne lui en voudrai pas. Entre deux conversations téléphoniques, il matait des animés japonais sur sa tablette. Un avant-goût, un pied frileux dans la piscine olympique de Japan Expo. D'ailleurs, à ce propos, il paraît que pour satisfaire les organisateurs, il ne faut pas dire "LA" Japan Expo mais Japan Expo sans article défini. Je ne sais pas si c'est vrai mais dans le doute je suis comme le chien à qui on apprend le caniveau, je ne comprends pas l'idée global mais comme ça fait plaisir, je m'exécute de la meilleure façon.
Le train arrive - en retard, donc - en gare de Lyon. Pendant toute la durée du voyage, j'ai tenu au courant Julien de l'avancée du train. Par SMS, pour ne pas déranger mon gars aux animés. Il faut que je vous parle de Julien de la chaîne Youtube La Balade du Sakura. Mais après. Après vous avoir mis en garde. Ça fait peur, hein ! Vous êtes vous déjà demandé si on mettait un "l" ou deux "l" à "balade" ? Et si oui, sous quelle condition ? Ce qui est rigolo dans l'affaire c'est que l'origine des deux mots est la même. En 1422, "balader" signifie "chanter des ballades". La logique à la française. En 1628, la signification du verbe évolue en "aller demander l’aumône" sous entendu "en chantant des ballades". La notion de mouvement restera jusqu'à nos jours. Donc, avec un "l", on marche, avec deux "l", les notes s'envolent.
Julien ne chantant pas encore face cam, c'est bien à un voyage au cœur du Japon qu'il nous invite au travers de ses nombreuses vidéos parfois contemplatives, toujours de qualité. Ce que vous ne pouvez pas savoir, c'est que le monsieur est un hôte en or. C'est la deuxième fois qu'il m'accueille chez lui lors de Japan Expo. Cet homme a la délicatesse non seulement de venir me chercher en gare, de m'accompagner en voiture jusqu'à chez lui mais surtout de me laisser son lit pendant que lui se paye un canapé sans doute compliqué, je ne sais pas, chez lui je ne connais que le lit. Je suis fier d'être son ami. À chaque fois qu'on se voit, mille projets naissent de nos conversations mais aucun ne voit jamais le jour. Notre façon de refaire le monde. Cette année encore, nous avons rêvé ensemble. Ça fait un bien fou, vous ne pouvez pas savoir. Qu'ils se réalisent ou pas, au moment où nous parlons de l'avenir, des étoiles plein les yeux et de la bière ou du rosé plein la tête, nous sommes heureux. Et c'est bien. Si on ajoute quelques tranches d'un petit saucisson au sel de Guérande sur la table, on atteint le Nirvana.
Le lendemain, lever 6H00. Il faut que nous arrivions de bonne heure au parc des expositions de Villepinte pour préparer le stand. Et comme nous avons une heure de route, il ne faut pas s'improviser de grasse mat'... Bon OK, je reprends. Pouf pouf ! Le lendemain, Julien se lève à 6H00. Ne me voyant pas arriver, il toque à ma porte. Je lui réponds de mon plus beau ronflement. Je me réveille un peu plus tard. Douche rapide, petit déjeuner sur le pouce, nous sommes en voiture. 8H30, nous présentons nos billets exposants qui, après validation, se transforment en bracelet dont les couleurs changeront selon le jour. Direction notre stand. L'an dernier nous étions du côté des stands traditionnels. Beaucoup de bruits, entre scènes musicales et Taiko. Cette fois, le stand de Vu du japon se trouve Hall 4, un peu l'endroit fourre-tout du festival. Nous sommes entourés de webséries, de spécialistes d'AMV (entendez Anime Music Video, ça consiste à combiner des images d'animés avec de la musique pour créer un clip) et, surtout, d'un groupe de métalleux qui, pendant les quatre jours joueront fort, très fort, trop fort, beaucoup trop fort, des musiques issues de jeux vidéos. Le prochain qui jouent à Tetris à côté de moi, même au casque, j'y enfonce la console dans le fion et j'espère pour lui que ça sera une console portable. Autant dire qu'on devait gueuler tout le temps pour se faire entendre par les visiteurs qui nous faisaient le plaisir de s'intéresser à nous. J'aurais pu leur parler plus prêt mais n'étant pas absolument sûr de l'exemplarité de mon goulot je préférais hurler à trois mètres. Et puis ça évite les postillons sur le nez, tout ça. J'ai toujours eu une facilité à me vendre, moi, c'est fou !
Je ne vais bien sûr pas entrer dans le détail de ce qui s'est passé sur toute la durée de l'évènement mais je vais partager avec vous mes moments forts. Jeudi après-midi, je vois arriver sur le stand un monsieur à l'embonpoint rieur, se promenant en costume trois pièces et chapeau Kumamon en carton sur la tête. Je ne sais pas qui est ce monsieur mais il semble important puisqu'il est accompagné d'un des orgas. J'apprendrai plus tard qu'il s'agissait de l'ambassadeur du Japon en France. Il n'avait même pas de Ferrero rocher au matcha dans la poche pour distribuer autour de lui. La réputation des ambassadeurs est surfaite. Je vous glisse une petite photo pour goûter à l'instant. Celui qui cause à Masato Kitera, c'est Julien, mon hôte, mon copain de saucisson. N'y voyez aucune allusion sexuelle, s'il vous plait. Vous ne savez vraiment pas vous tenir devant un diplomate, vous !
À partir de vendredi, nous recevons sur le stand des invités qui tiendront une présence d'un heure, en plus de la dizaine de vidéastes du collectif présents en quasi-permanence. Ça en fait du beau monde. On commence par accueillir deux auteurs. Chrystina Caombo découvre le barnum pour la première fois. Elle fera plein de rencontres et arrivera jusqu'en final d' un concours pour devenir ambassadrice de la municipalité de Susaki. Je dois mes plus plates excuses à Monsieur OP qui me dédicacera sa méthode d'apprentissage des caractères japonais et que j'oublierai dans le feu du départ. Shame on me ! Nous rejoindrons également nos partenaires de cœur, Japon Infos et Jap Actu.
En ce qui me concerne, le climax de la journée sera le tournage avec la sympathique équipe de la chaîne Road n' Troll. Une expérience nouvelle pour moi que de parler devant plusieurs caméras pendant que la foule se demande "qui est ce mec que j'ai jamais vu ?", dont la silhouette tient plus du physique de radio. Dès que je croisais un regard dubitatif, je perdais mes moyens, je ne savais plus comment enquiller les mots de façon intelligente. Prise, reprise et nouvelle prise. Ça n'a pas dû être facile de monter mes petits bouts de phrases cohérentes. À un moment, je me retrouve à marcher comme si de rien n'était sans lancer la moindre œillade aux caméra qui me suivent, qui n'existent pas, surtout, je suis seul au monde. Je tente une marche normale, un pied devant l'autre, tout ce qu'il y a de plus banal, mais, vous allez le voir parce que la vidéo est juste en dessous, je me retrouve avec la dégaine de John Wayne après une journée de selle. Et, je parle bien de cheval, bande de gamin pipi caca. Yann et Géraldine - qui seront ravis de découvrir leur prénom à côté de "pipi caca" - en maîtres d’œuvre ont mené le tournage de manière hyper pro et grâce à leur bienveillance et à celle de toute l'équipe, malgré mon inévitable stress, ce fut un moment délicieux, je dirais même exquis. Et quand on me connaît, on sait que je n'emploie cet adjectif qu'à bon escient. En apothéose, J'ai eu l'occasion de parler pour la première fois en vidéo du présent blog. Je ne sais pas si j'ai bien vendu l'bouzin. Matez le reportage et vous me dites en commentaires. Et bien sûr, on n'oublie pas le pouce bleu, le petit mot sous la vidéo et l'abonnement à la chaîne, la moindre des choses.
Vienne la nuit, sonne l'heure, les jours s'enchaînent, je demeure. Arrive samedi, LA grosse journée, autant en nombre de visiteurs que d'invités sur le stand. Angélique de Tokimeki, l'ouragan de bonnes ondes dont le livre Étudier au Japon pour les nuls sort dans quelques semaines, Jules en Asie que je rencontre pour la première fois aussi sympathique, classe et beau gosse de ouf que dans ses vidéos, la star Louis San à la file d'attente impressionnante et la toujours aussi sémillante Sabrina de France Japon devenue cette année ambassadrice de Suseki et ça fait grave plaisir pour elle. Une journée chargée, un monde incroyable et l'impression en fin de journée d'être fatigué pour les bonnes raisons. Je devais finir la journée à la soirée "La Japonaise" organisée par Joël de Musekai Corp mais je suis vétuste. Ce qui n'est pas le contraire de nudiste. Je suis vieux, quoi ! Bref, mon corps s'est rappelé à mon bon souvenir. On rentre direct avec Julien comme le couple de petits vieux que nous sommes. En vrai, Julien est un peu plus jeune, plus énergique mais il a une autre mission pendant tout l'évènement, filmer les coulisses dans le cadre d'un documentaire. Alors, quand vient l'heure de quitter Japan Expo et de se demander ce qu'on fait après, nous tombons d'accord pour jouer les bonnets de nuit.
Dimanche. Dernier jour. Enfin ! Une journée 100% féminine côté invitées. La grande et pétillante Sam et les dramas, Maevamilk que je découvre, Les petits papiers de Mélo avec qui je n'ai pas eu l'occasion de discuter et une revenante sur le stand, Cécilia du site Passeport Japon. L'acmé du jour sera pour moi, Julien et Damien de la chaîne Oishi San une conférence d'une demi-heure à 14H30 sur la scène Nezumi. On arrive un quart d'heure avant la prestation comme il nous a été demandé. On nous fait patienter en coulisses, derrière la scène. ce qui nous permettra de nous goinfrer de petits bonbons gélatineux. Les avantages de la vie de star. Dernier jour, après-midi, cumul de fatigue, je serai assez moyen sur scène. Heureusement, épaulé par mes deux collègues, nous tiendrons jusqu'au bout un public relativement nombreux par rapport à la notoriété de nos trois chaînes qui, pourtant, ne jouera que très modérément l'inévitable jeu des questions/réponses de fin de conf.
Puis arrive le moment de récupérer l'ensemble de mes bagages, de saluer tout le monde, enfin ceux qui sont sur le stand à ce moment-là, de grimper Jolly Jumper et de m'enfoncer dans le désert au son d'une guitare triste et néanmoins country. I'm poor lonesome cowboy. Tel un ado cosplayé en Papa Japon, je sors du bâtiment, passe sous les voies du RER pour retrouver mes parents qui m'attendent dans leur voiture. Je m'octroie quelques jours de vacances bien méritées dans le Nooooord. Cure de lasagnes, tout ça.
L'expérience de Japan Expo, la rencontre des "collègues", des invités, des connaissances, des personnes qui nous suivent sur Mission Japon, c'est à la fois intense, fatiguant et tellement revigorant. Le bruit, la chaleur, les odeurs corporelles ne m'empêcheront jamais de goûter à l'émotion, au plaisir, au pur kif qu'on ressent dans de tels moments. Je ne sais pas si l'expérience se renouvèlera l'année prochaine. Je ne sais pas si j'aurai envie d'être présent sur les quatre jours. Ce dont je suis sûr, c'est que si je n'ai pas ma dose en juillet prochain, je serai bien triste.
Mais il n'y a pas que Japan Expo. La preuve, je vous annonce que je serai invité au Japan Natsu près de Toulouse les 24 et 25 août prochain. Si vous êtes dans le coin, n'hésitez pas à venir me faire un petit coucou. 😉
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